Initialement prévu en Afrique du Sud en 2020, le 3ème congrès d’IndustriALL Global Union se sera finalement tenu de manière virtuelle ces 14 et 15 septembre. IndustriAll Global Union représente 50 millions de travailleurs, 435 organisations syndicales des secteurs miniers, de l’énergie et de la manufacture répartis dans 111 pays. L’organisation se bat pour de meilleures conditions de travail et pour les droits syndicaux dans le monde entier.
Les 14 et 15 septembre, ce sont donc plus de 3.000 délégués et observateurs de plus de 100 pays qui ont discutés et débattus, élus une nouvelle direction et adoptés un plan d’action ambitieux pour les quatre prochaines années.
Même si le covid a empêché une réunion physique, ce congrès virtuel reste une réussite.
Les débats ont été intenses et le congrès a aussi permis de tirer le bilan des 5 années passées et de réfléchir sur les actions syndicales à venir.
Hommage à la lutte contre l’apartheid
Le congrès a commencé par une vidéo sur les syndicats et la lutte contre l’apartheid. Les travailleurs noirs en Afrique du Sud ont trouvé leur pouvoir collectif par le mouvement syndical. Un hommage a été rendu en introduction.
Des débats intenses
Durant ces deux journées, les débats ont notamment porté sur une augmentation de la représentation des femmes au sein de l’organisation, la protection des travailleurs du secteur textile qui progresse mais pas encore suffisamment depuis l’incendie au Bangladesh. La santé et la sécurité des travailleurs restent des préoccupations majeures. A ce propos, la signature d’accords-cadres mondiaux permet de progresser, mais le focus sur les entreprises multinationales devrait encore s’améliorer.
Parmi les défis, citons aussi l’augmentation des emplois dans le monde. 60% des travailleurs n’ont pas de couverture sociale sans oublier la transition juste qui reste une préoccupation essentielle étant donné l’écart de développement entre pays dans le monde.
Plusieurs résolutions de soutien aux luttes dans les pays impactés par les attaques démocratiques et anti syndicales ont également été adoptées par les syndicats réunis en congrès.
Une nouvelle direction syndicale élue et un programme d’actions ambitieux pour les 4 prochaines années :
Des élections en ligne ont été organisées pour mettre en place une nouvelle équipe de direction.
Atle Høie, ancien Secrétaire général adjoint, a été élu Secrétaire général.
Jörg Hofmann, Président du syndicat allemand IG Metall, restera Président d’IndustriALL.
Kemal Özkan a été réélu en tant que Secrétaire général adjoint et a été rejoint par Kan Matsuzaki, précédemment Directeur de la section d’IndustriALL regroupant les TIC, l’électricité et l’électronique, ainsi que la construction navale et la démolition des navires,
et Christine Olivier, Secrétaire internationale du syndicat sud-africain NUMSA.
Il y a également six nouveaux Vice-présidents issus des différentes régions d’IndustriALL :
Asie-Pacifique – Akira Takakura, Japon
Amérique latine et Caraïbes – Lucineide Varjao, Brésil
Moyen-Orient et Afrique du Nord – Abdelmajid Matoual, Maroc (2021-2022), Hashmeya Al Saadawi, Irak (2022-2023), Saleh Kandil, Maroc (2023-2024), Habib Hazami, Tunisie (2024-2025)
Amérique du Nord – Anna Fendley, États-Unis
Afrique subsaharienne – Joseph Montesetse, Afrique du Sud
Europe – Garbinea Espejo, Espagne (les deux premières années), Marie Nilsson, Suède (les deux années suivantes)
Gagner la guerre des droits des travailleurs et travailleuses
Dans son discours d’ouverture, le Président d’IndustriALL et d’IG Metall, Jörg Hofmann, a parlé de la nécessité d’une justice vaccinale : la pandémie a laissé des millions de personnes sans revenus, trop de personnes sont mortes, les droits de l’homme et des travailleurs se sont détériorés et il y a eu une augmentation de la discrimination et de la ségrégation.
Les pays pauvres ont un accès très limité aux vaccins.
“C’est profondément injuste : nous avons besoin d’une distribution équitable et mondiale des vaccins.”
Alors que les délégués du Congrès débattaient du plan d’action proposé pour la prochaine période de quatre ans, le Secrétaire général d’IndustriALL, Atle Høie, a souligné la nécessité d’une participation des syndicats affiliés :
“Les droits des travailleurs sont foulés aux pieds et attaqués chaque jour.
Nous sommes en droit d’attendre que ces droits, reconnus par l’OCDE, les organes de l’ONU et de nombreux gouvernements, soient respectés.
Nous sommes la force syndiquée qui s’interpose entre les multinationales et un pouvoir dictatorial total sur l’ensemble du processus de production.
Comment gagner cette guerre pour des droits ?”
La Secrétaire générale adjointe Christine Olivier s’est exprimée sur le renforcement du pouvoir syndical :
“Nous devons revenir à l’essentiel, construire des syndicats démocratiques, contrôlés par les travailleurs, qui permettent d’obtenir des emplois de qualité et permanents. Tous les accords conclus, y compris les accords mondiaux avec les multinationales, doivent faire progresser les droits des travailleurs. Ces accords, à l’avenir, doivent être exécutoires, en particulier au sein de l’ensemble des chaînes d’approvisionnement.”
Le Ssecrétaire général adjoint Kan Matsuzaki a évoqué la confrontation avec le capital mondial :
“Nous avons besoin d’outils internationaux plus puissants pour imposer des obligations contraignantes aux entreprises multinationales et pas seulement leur demander de bien vouloir respecter les droits fondamentaux des travailleurs et travailleuses.”
En présentant le débat sur une politique industrielle durable, le Secrétaire général adjoint Kemal Özkan a déclaré :
“Le mouvement syndical international a la responsabilité historique de faire face aux mégatendances qui influencent l’avenir du travail, notamment le changement climatique, la numérisation et Industrie 4.0. Nous exigeons une Transition juste.”
Après que de nombreuses prises de parole sur le thème à débattre, les délégués et déléguées du Congrès ont adopté l’ambitieux plan d’action sur la promotion des droits des travailleurs, la construction de syndicats forts, la confrontation avec le capital mondial et une politique industrielle durable.
La solidarité internationale est cruciale pour IndustriALL et le Congrès a adopté à cet égard un certain nombre de résolutions. Des leaders syndicaux de Biélorussie, de Corée, d’Eswatini, d’Indonésie et du Myanmar se sont exprimés les situations difficiles dans leurs pays respectifs, où le travail syndical est paralysé en raison d’imposantes attaques contre les droits des travailleurs et la liberté syndicale.
Au sujet de la résolution sur les jeunes, Amy Bracegirdle de l’AMWU, Australie, a déclaré :
“Les structures qui ont permis à de nombreux dirigeants syndicaux de développer leurs compétences et leur engagement pour la cause du mouvement ouvrier ont changé. Les jeunes travailleurs et travailleuses sont souvent en première ligne des violations de nos droits. Pour faire progresser les droits des travailleurs, le Congrès devrait adopter la résolution sur la jeunesse, afin de créer plus d’espace dans les structures syndicales pour les jeunes travailleurs et travailleuses.”
Le Congrès a également adopté des résolutions sur l’Afghanistan, sur la coopération avec d’autres Fédérations syndicales internationales, sur la construction d’une IndustriALL Global Union forte, unie et dynamique, qui mène des campagnes, ainsi que sur la lutte contre le sexisme et la violence fondée sur le genre au sein des structures syndicales et des lieux de travail.
Monica Veloso, de la CNTM Brésil, a illustré comment la pandémie a aggravé la situation précaire des femmes :
“Nous devons nous battre pour la ratification de la C190 de l’OIT afin de lutter contre la violence et le harcèlement dans le monde du travail. Il n’y a pas d’avenir sans égalité : nous devons faire comprendre à la classe ouvrière mondiale que le leadership féminin au sein de notre fédération syndicale internationale est essentiel pour l’avenir du mouvement syndical international.”
La CGT sera bien présente au sein d’Industriall Global Union puisque nous avons une élue au sein du comité exécutif. Notre fédération poursuivra son travail au sein de la Fédération Industriall Global Union avec notamment la poursuite des réseaux mondiaux syndicaux au sein des multinationales et la volonté de mettre en place des instances mondiales de dialogue social au sein de ces multinationales (les comités de groupe monde par exemple) et de négocier des accords cadres ambitieux en matière notamment de :
– Droits syndicaux dans les pays d’implantation des multinationales
– Un plus grand dialogue entre les comités européens et les syndicaux non représentés dans les CEE et les syndicats hors Europe des multinationales.
– Des accords cadres en matière d’égalité professionnelle, de santé au travail, de prévention et de reconnaissance des maladies professionnelles, de sécurité au travail, de rémunération.
Rappelons que nous avons mis en place 2 réseaux syndicaux mondiaux qui malheureusement rencontrent des difficultés à se réunir suite à la pandémie.
Mais ce travail se poursuivra notamment par la mise en place d’indicateurs de respects des normes sociales et écologiques dans les multinationales.
Mohammed OUSSEDIK, secrétaire général de la Fédération CGT Verre-Céramique a participé en tant que délégué à ce 3ème Congrès très particulier.